Explosion de l'usine AZF de Toulouse (2)
SCENARIO POUR UNE CATASTROPHE QUI AURAIT PU ETRE EVITEE.

21 septembre 2001, la journée de travail débute normalement sur le site du pôle chimique toulousain, à la limite sud de la ville, au bord de la Garonne encore sauvage. Chez AZF, la production se déroule normalement mais à la SNPE, l’unité de co-génération – qui produit à la fois de l’électricité et de la vapeur – est en phase de maintenance. Les techniciens de la Sté Elyo Midi Océan s’affairent autour des deux turbines à gaz de 5,1 MW chacune. Comme toujours, dans ces cas là, la Société Nationale des Poudres et Explosifs (et ses entreprises conjointes) continue à fonctionner en s’alimentant en électricité via une liaison souterraine 63 kV qui relie le poste de transformation de la SNPE (poste dit " du Ramier ") au réseau EDF (poste de Lafourguette). Vers 10 heures du matin, la maintenance des turbines est sur le point d’être terminée. Il va falloir procéder aux essais habituels avant la remise en activité de l’unité de co-génération. Ces essais impliquent cependant que les alternateurs entraînés par ces turbines ne soient pas couplés au poste de transformation qui, à ce moment-là, est couplé au réseau EDF. En effet, il faut plusieurs minutes aux turbines pour atteindre leur régime normal de rotation et, pendant ce laps de temps, le courant électrique produit par les alternateurs n’est pas compatible avec celui qui provient du réseau EDF (manque de synchronisme).

Il semble cependant se confirmer que vers 10 heures et 17 minutes, l’unité de co-génération de la SNPE sera remise en marche, alors même que leurs alternateurs sont toujours couplés au transformateur du poste " Ramier ". La confirmation de ce fait provient de déclarations selon lesquelles les ailettes des turbines auraient été endommagées, ce qui implique que les turbines tournaient au moment même où la catastrophe s’est produite. Etant enfermées à l’intérieur des carters, les pales des turbines étaient à l’abri du souffle produit par l’explosion du hall 221 d’AZF. Selon sources EDF, nous savons aussi qu’au même moment, le poste " Ramier " était toujours alimenté par le réseau via le poste de Lafourguette. L’unité de co-génération a donc bel et bien été remise en marche alors même qu’elle était couplée au poste de transformation, lui-même couplé au réseau EDF.

C’est cette erreur humaine qui va déclencher toute une série d’incidents qui aboutiront à la catastrophe que l’on sait.

Entre 10 h17’ et 10 18’, les alternateurs de l’unité SNPE commencent à injecter un courant non synchrone dans le poste de transformation avec, pour résultat, ce que les électriciens nomment un " faux couplage ". Cet incident va générer des contraintes électromagnétiques considérables sur le matériel, entraînant notamment des torsions très importantes sur certains éléments métalliques et en particulier sur le jeu de barres qui achemine le courant jusqu’au transformateur. C’est très vraisemblablement à la suite de ces contraintes qu’une phase sera mise à la terre. Tout porte à croire qu’une barre acheminant le courant de l’une des phases s’est détachée et est entrée en contact avec des éléments mis à la terre.

On passe ainsi du " faux-couplage " à l’incident " phase-terre ", lequel va avoir pour effet d’injecter un très fort courant de défaut dans le sol. Comme nous l’avons déjà fait remarquer dans de précédents documents, il ne faut surtout pas confondre une courant de défaut avec un " courant vagabond ". Le courant de défaut est très court mais intense. Le gradient de potentiel s’élève à plusieurs milliers ou dizaines de milliers de volts tandis que l’intensité va croître dans des proportions considérables jusqu’à ce que le circuit soit coupé par les disjoncteurs.

Pendant quelques dixièmes de secondes, ce courant de défaut va donc se propager dans le sol à la vitesse du photon (env. 300.000 km/sec.) puisque le courant alternatif 50 Hz est une onde électromagnétique. Il va, en fait, " refermer le circuit " en se dirigeant du point de défaut vers le point d’injection, en l’occurrence le poste EDF de Lafourguette dont le déclenchement sera dûment enregistré quelques secondes avant l’explosion du hall d’AZF.

Dans le cas de la catastrophe du 21 septembre 2001, cette cascade d’incidents électriques – qui aurait pu n’avoir que des conséquences mineures – va être à l’origine de l’explosion destructrice, ou plutôt des deux explosions qui ont été perçues par des très nombreux témoins. La première, sans grandes conséquences, s’est produite à la SNPE mais son origine précise n’a pas encore pu être déterminée. Elle a sans doute dû se produire au niveau du groupe de co-génération ou du transformateur en générant une onde sismique qui a été enregistrée dans la région.

Mais c’est le courant de défaut qui va être à l’origine de la catastrophe proprement dite. En effet, si l’on trace une ligne qui va du transformateur SNPE-Ramier au transformateur EDF-Lafourguette, on remarque que cette ligne passe très exactement sous l’unité de production de nitrates de l’usine voisine, AZF. Entre le transformateur SNPE et le hall 221 d’AZF, il y a moins de 500 mètres. En outre, le sol est, en cet endroit, extrêmement conducteur. Il l’est à cause du bras de la Garonne qui sépare AZF de la SNPE mais il l’est également par le fait que le sol est gorgé de nitrates qui ont été dissous par les pluies depuis des décennies. Le courant de défaut n’a donc rencontré aucune résistance particulière, bien au contraire.

Chez AZF, une bonne partie des bâtiments est métallique ou en béton armé. Leurs structures sont " à la masse " (à la terre ) et vont donc se trouver " chargées " électriquement par le courant de défaut, se transformant ainsi en armatures de condensateurs. En posant la main sur des structures métalliques ainsi chargées, plusieurs membres du personnel d’AZF seront d’ailleurs victimes de chocs électriques violents juste avant l’explosion du hall 221.

Entre les éléments métalliques chargés, des décharges électriques vont inévitablement apparaître par le fait de l’ionisation de l’air à proximité desdits éléments. Ce sont les " éclairs " qui ont été vus par plusieurs témoins dignes de foi. Ce sont ces décharges, survenant au niveau des structures du hall de stockage 221 – celui qui contient le nitrate déclassé en vrac – qui vont aussi, et surtout, amorcer le processus chimique fatal, à savoir la décomposition du nitrate d’ammonium en oxyde d’azote, en gaz ammoniac et en hydrogène. Des témoins affirment d’ailleurs avoir vu un nuage jaunâtre qui s’élevait de l’usine AZF juste avant l’explosion. Ce nuage n’est autre que le gaz ammoniac résultant de la décomposition du nitrate sous l’effet de la chaleur générée par les arcs électriques.

La réaction de décomposition a pu produire assez d’hydrogène libre pour que celui-ci, en se mélangeant avec l’oxygène de l’air ambiant produise un mélange détonant (voir nos documents précédents). C’est ce mélange qui a été à l’origine de l’explosion meurtrière, une explosion " aérienne " qui n’a guère laissé de traces " sismiques " mais qui a engendré un souffle dont on connaît, hélas, les effets. On se retrouve dans une configuration assez proche de celle qui découle de l’utilisation des bombes surnommées  " Daisy Cutter " (" faucheuse de pâquerettes "), bombes au nitrate d’ammonium que les militaires US utilisent pour dégager un terrain en vue de l’installation d’une aire d’atterrissage de fortune.

La seconde explosion a généré un second incident électrique (notifié par EDF) qui fut sans doute provoqué par des éléments métalliques (tôles, ferrailles diverses,…) qui ont provoqué un court-circuit " phase-phase " au niveau des lignes électriques aériennes toutes proches. Ce second incident a bien été enregistré juste après l’explosion, moins de 10 secondes après l’incident initial.

Ce scénario semble bien être celui de la catastrophe du 21 septembre. Il est parfaitement cohérent et permet de recouper l’ensemble des témoignages, y compris ceux qui ne s’accordaient absolument pas avec les hypothèses " officielles ", celles qui refusent d’admettre une autre cause que celle de l’accident purement chimique. C’est le scénario d’une erreur humaine banale dont les conséquences ont été gravissimes, comme à Tczernobyl.

C’est aussi le scénario d’une catastrophe qui aurait été évitée si les installations électriques incriminées avaient été dotées des protections nécessaires, à savoir des inductances de compensations (IC) aussi nommées " bobines de Petersen ". Voir à ce propos, ce qui a été dit dans nos précédentes communications.

C’est aussi le " scénario qui dérange " car, contrairement à ce que les " autorités " continuent à prétendre, la responsabilité ne se situerait pas au niveau du groupe AZF-Total Fina – ELF mais au niveau d’une société d’Etat, la SNPE, ou de l’un de ses sous-traitants (Elyo Midi Océan), puisque l’erreur n’a pu être commise que par un électricien de la SNPE ou par un technicien de l’entreprise de maintenance. Et comme la facture est lourde – très lourde – l’Etat français préfère imputer les responsabilités à Total-Fina-ELF plutôt qu’à une entreprise dont elle a la tutelle directe et qui, en outre, travaille pour le compte de la défense nationale et de plusieurs secteurs " stratégiques ".

Dans un tel cas d’espèce, la vérité risque fort d’être occultée en vertu de la " raison d’Etat " et l’on parle déjà d’un " accord secret " qui aurait été passé entre le gouvernement français et le groupe Total-Fina-Elf. Cet accord prévoirait que le groupe privé accepterait de " porter le chapeau " en échange de toute une série de " compensations " plus ou moins occultes.

Autant savoir ! Daniel DEPRIS

Voir aussi l'enquète ultérieure :
Toulouse An 1 après AZF
Août 2002

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