Dans notre communiqué mentionné ci-dessus, nous avions évoqué les mensonges grossiers que le Dr Aurengo avait distillés sur lantenne de France 2 Télévision en se prévalant de son statut de membre de lAcadémie de médecine. Il avait notamment affirmé que le problème des lignes électriques nétait pas un problème de champs électromagnétiques mais quil sagissait seulement dun problème de « courants vagabonds ».
Nous avons retrouvé dans nos archives le texte du rapport publié, le 29 juin 1993, par lAcadémie Nationale de Médecine. Il a été rédigé par le Dr Jean-Claude Roucayrol et certifié conforme par le Pr Raymond Bastin, secrétaire perpétuel de ladite académie. Cest ce document qui énonce, au point 2 de ses conclusions, que « au moins dans le cas des leucémies chez lenfant (la réalité des associations qui ont été décrites entre champs électromagnétiques et certaines pathologies), reste concevable même en labsence dun mécanisme explicatif confirmé ».
Or, en nous reportant à la première page de ce rapport, nous constatons que le groupe de travail qui en est lauteur se composait de MM. Cara, Roucayrol et Soulairac mais aussi (avec la mention « ont également participé aux travaux ») Mme Gluckman ainsi que MM. Coste, Le Bars et Aurengo !
Le Dr Aurengo avait donc participé à la rédaction de ce document qui sintitule « Rapport sur les champs électromagnétiques de très basse fréquence et la santé » ! Et il a le culot, en cette année 2009, de prétendre que la problématique des lignes électriques à courant alternatif (50 Hz) na rien à voir avec les champs électroma-gnétiques ? Si cet individu a décidément bien mérité son poste dadministrateur dEDF (entre menteurs on doit bien sentendre, non ?), il conviendrait de lexclure de lAcadémie de Médecine pour cette grave entorse à la déontologie médicale.
Notons encore que, parmi les personnes qui « ont participé aux travaux » du groupe de travail de lAcadémie de médecine, on trouvait également un certain Le Bars qui ne peut être que le Pr Henri Le Bars, de lEcole vétérinaire de Maison-Alfort. Il a affectivement travaillé sur les effets que les champs induits provoquent sur les espèces animales mais son laboratoire a rapidement été placé sous la « haute surveillance » de la direction générale dEDF (qui a largement financé ce labo afin de pouvoir censurer la publication des résultats de recherche).
De cela, on peut conclure que le groupe de travail qui a rédigé le rapport de juin 1993 était lui-même placé sous la surveillance de la direction générale dEDF qui ne tenait pas à ce que ce rapport puisse lui être défavorable. Il nen demeure pas moins que ce document constitue la preuve incontestable de lextrême malhonnêteté intellectuelle du Dr Aurengo.
Cette nouvelle affaire de manipulation des prétendues « autorités médicales » nous rappelle la manipulation identique qui avait affecté les travaux du CSHPF (Conseil Supérieur dHygiène Publique de France) lorsque cette instance avait abordé la problématique des lignes à haute tension, le 30 mai 1989. A lépoque, la section « Evaluation des risques de lenvironnement sur la santé » dudit CSHPF avait, au point 4 de son ordre du jour, examiné - du moins en théorie - les « Risques liés aux rayonnements non ionisants issus de lignes à haute tension ». Un examen qui avait dû être pour le moins « rapide » compte tenu de lordre du jour chargé ainsi que de lheure de début et de fin de séance. En outre, le PV atteste du fait que ce point IV fit présenté par une personne « invitée » (non membre du CSHPF), en loccurrence une certaine Mme Ménétrier. Or, nos recherches permirent de découvrir que ladite Mme Ménétrier était membre du personnel du CEA (Commissariat à lEnergie Atomique) donc du lobby électronucléaire. Il ny a donc rien de bien étonnant à ce que le CSHP se soit contenté de déclarer, après cet examen pour le moins rapide et particulier, que les lignes électriques aériennes ne présentaient aucun danger pour la santé humaine !
Nous pourrions aussi évoquer le cas du service dépidémiologie dEDF qui fut fermé du jour au lendemain après que deux de ses membres (Le Pr Marcel Goldberg, de lInserm 88, et Ellen Imbernon, médecin du travail dEDF) eurent publié des résultats « dérangeants » pour la direction dEDF. Rappelons que le Dr Imbernon avait été licenciée pour « faute grave » avant dêtre réintégrée sur décision du tribunal du travail. Et que dire du ministre de lIndustrie qui répond à la place du ministre de la santé lorsquun élu interpelle le gouvernement à propos des effets sanitaires des champs induits par les lignes électriques ? Cest pourtant ce que fit Christian Pierret lorsque le problème fut posé par le maire de Saint-Girons (par ailleurs conseiller général de lAriège) comme le prouvent les lettres en notre possession.
Nous disposons également de documents prouvant que la direction générale dEDF a tenté de manipuler le Pr Lazare en vue de constituer un pseudo comité scientifique couvert par les autorités médicales françaises. Le document est signé par Rémy Carle, directeur général adjoint dEDF (et membre éminent du lobby nucléaire). Il était accompagné dune note rédigée par le Dr Lambrozo et le Pr William Dab, appartenant tous deux au service des « études médicales » dEDF.
Pendant combien de temps la comédie va-t-elle encore durer ? Pendant combien de temps la direction générale dEDF va-t-elle encore manipuler les instances sanitaires et médicales à seule fin dempêcher que des mesures soient prises en vue de protéger les personnes et les animaux qui subissent quoti-diennement les effets nocifs des champs électromagnétiques à très basse fréquence que génèrent les ouvrages électriques à courant fort, essentiellement les lignes aériennes et les postes de transformation ?
Quen dites-vous, Mesdames et Messieurs qui faites profession de repré-senter les droits et intérêts des citoyens au sein des différentes instances politiques et administratives ?
En ce qui concerne les partis politiques français, nous avons observé que les formations dites « de gauche » nont jamais tenté de sopposer, de quelque manière que ce soit, à la politique menée par EDF et le lobby électronucléaire. Au cours de 25 dernières années, le PS a même fourni les meilleurs alliés dEDF en la personne de MM. Strauss-Kahn (deux fois ministre de lIndustrie et « consultant » dEDF entre ses deux mandats ministériels), Christian Pierret (secrétaire dEtat sous Strauss-Kahn) et Bernard Kouchner (ministre de la santé à lépoque où il se prétendait socialiste) mais aussi de Mme Ségolène Royal (en sa qualité de ministre de lenvironnement). Sans oublier la dénommée D. Voynet qui sest également comportée en valet docile de lentreprise EDF, notamment en signant le « pacte secret de gouvernement » du 2 septembre 1997 au château de Champs-sur-Marne (*). On ne sétonnera pas, non plus, de constater que Mme Michèle Rivasi siège au sein du groupe socialiste de lAssemblée nationale (**).
La droite libérale ne sest pas mieux illustrée dans la défense des citoyens face à EDF et à ses filiales. Exception faite pour M. Alain Juppé lequel, en sa qualité de premier ministre, a eu le courage de sopposer politiquement et ouvertement à un « grand projet » dEDF, en loccurrence le projet de ligne 400 kV dit « du Louron » (en 1996). Il faut toutefois considérer que sa décision fut largement motivée par la prise de position de Mme Corinne Lepage (ministre de lenvironnement de lépoque et « non alignée » sur le plan politique en 1996) et par lintervention de M. Philippe Douste-Blazy, député-maire centriste de Lourdes.
Cest aussi un parlementaire centriste, le député-maire (et ancien ministre) de Vitré qui fut à lorigine de la « proposition de loi tendant à indemniser les familles habitant dans des secteurs où simplantent des lignes à très haute tension ». Enregistrée en date du 19 décembre 1991, cette proposition sinscrivait dans le cadre de celle qui avait été formulée par Daniel Depris lors de son intervention, en 1988-89, dans le combat mené contre le projet de ligne 400 kV « Domloup-Les Quintes » (la région de Vitré se trouvant directement concernée par ce projet).
En son article premier, le texte proposé par Pierre Méhaignerie et le groupe de lUnion du Centre (***) prévoyait que : « Les propriétaires de résidence principale ou secondaire ou de bâtiments dexploitation situés dans une bande de 100 mètres de largeur totale de part et dautre de la ligne à très haute tension doivent être indemnisés des préjudices nés de la présence de la ligne. En conséquence, lorsque le propriétaire dune résidence ou de bâtiments dexploitation, situés comme ci-dessus, le vend pour quelque cause que ce soit, il lui est versé une indemnité correspondant à la moins value constatée lors de la vente ; elle est calculée sur les transactions effectuées dans le voisinage pour des habitations ou des bâtiments dexploitation identiques ».
A lépoque, le président du CEPHES avait salué linitiative du groupe centriste tout en critiquant certains aspects du texte proposé. Daniel Depris refusait lintitulé de la proposition de loi qui faisait mention de « lignes à très haute tension » alors même que le problème découle en réalité des « ouvrages à courant fort » (autrement dit de lintensité transportée bien plus que de la classe de tension). Il constatait, par ailleurs, quil était fait mention dun « préjudice » mais que la nature de ce préjudice nétait pas mentionné dans la proposition de loi. Il napparaissait que dans le texte complémentaire dit « exposé des motifs » qui mentionnait notamment que certains Etats des USA interdisaient toute construction « dans un champ de lordre de 200m de chaque côté dune ligne » et que les nuisances étaient le préjudice de vue, de champs magnétiques, de bruits, dactions biologiques. Des nuisances qui demeu-raient « à lappréciation des tribunaux ».
Pour le CEPHES, les 2 x 100 mètres proposés par le groupe centriste était par trop arbitraires et insuffisants tandis que labsence de définition des nuisances constituant le préjudice était de nature à poser des problèmes juridiques. Il nétait pas admissible que des nuisances dûment identifiées et attestées soient laissée à lappréciation de magistrats.
Le CEPHES critiquait par ailleurs larticle 3 de la proposition Méhaignerie qui visait à faire financer les mesures résultant de lapplication de cette loi « par linstauration dune taxe sur les consommations délectricité ». Ce qui revenait à faire payer lensemble des consommateurs pour les erreurs commises par EDF ! ! ! Cet article 3 était résolument en infraction avec larticle 130 R du Traité de lUnion européenne tel quil était édicté depuis 1986.
Le texte Méhaignerie ne fut pas adopté mais il fut en partie repris dans le protocole « Etat-EDF » du 25 août 1992 relatif à linsertion des réseaux électriques dans lenvironnement (****). Cest ainsi que larticle 5 de ce protocole prévoit lindemnisation des riverains pour les « maisons dhabitation principales ou secondaires situés à proximité de lignes électriques ou de postes de transformation 400 kV et 225 kV, construites ou achetées par les propriétaires avant louverture de lenquête de la DUP de louvrage, si, dans les 4 ans suivant la mise en service de la ligne ou du poste, le propriétaire vend sa maison ».
Le protocole, qui ne mentionne que la « gène visuelle », prévoit aussi que le propriétaire conserve cette possibilité au terme de ces quatre années mais peut également y renoncer par voie conventionnelle moyennant une contrepartie finan-cière immédiate dEDF tenant compte de cette renonciation. Rien nest vraiment clair dans ce texte qui ne concerne que les maisons dhabitation et ne sapplique donc pas aux « bâtiments dexploitation » (comme le prévoyait la proposition Méhaignerie). On est aussi dans le « flou artistique » en ce qui concerne le « couloir de nuisance » puisque le texte ne parle que de « proximité » sans établir ni distance ni niveau de nuisance. Enfin, le protocole introduit une discrimination inadmissible entre les riverains des « nouveaux ouvrages » et ceux qui subissent les nuisances engendrées par les lignes dont la construction est antérieure à la signature du protocole. Tout cela tenait du bricolage et allait dans le sens voulu par EDF avec les mensonges habituels en ce qui concernait les effets sur la santé et le mutisme le plus complet à propos de lenfouissement des réseaux 400 kV.
On constate donc, pièces à lappui, quEDF et le lobby des lignes aériennes manipule aussi bien les milieux médicaux que les milieux politiques. Pour EDF et les industriels qui se servent de cette entreprise comme paravent, il ne faut surtout pas remettre « lordre établi » en question. Et cet ordre passe par un contrôle absolu de la politique énergétique française par les lobbies. Des lobbies qui sont aidés dans leur démarche par des politiciens « compréhensifs » et par des médecins très peu scrupuleux. Au parlement, le député Lenoir fut lune des chevilles ouvrières du groupe des « apparentés EDF » (ainsi nommé par les autres parlementaires). Le jeu joué par le député Kert (député centriste des Bouches-du-Rhône) fut plus subtil mais quand même mis à jour par le président du CEPHES après la publication du rapport censé avoir été écrit par ledit Kert (voir lanalyse de ce rapport sur notre site Internet).
Il ne nous appartient toutefois pas de nous perdre dans les méandres de la politique politicienne. Peu nous importe que les lois soient proposées par la gauche ou la droite. Ce qui nous importe, cest quelles soient proposées, quelles soient cohérentes et surtout quelles soient votées !
Force est cependant de constater que, dans le cas de la France, ce sont des personnalités du Centre et de droite qui ont eu, jusquà présent, la volonté dinterve-nir efficacement dans le dossier très « sensible » des nuisances électromagnétiques générées par les ouvrages électriques. Outre Alain Juppé et Pierre Méhaignerie, il faut aussi mentionner Philippe Douste-Blazy qui avait accédé à notre requête en exigeant, en sa qualité de ministre de lenvironnement, que ce dossier soit réouvert et examiné avec toute lattention quil méritait. On sait que, très peu de temps par la suite, il fut démis de ses fonctions de ministre de la santé et mis sur une voie de garage (comme ministre de la culture) !
Mis à part M. Michel Rocard, les dirigeants politiques du « centre » sont les seuls à avoir répondu clairement et ouvertement aux courriers qui leur ont été adressés par la présidence du CEPHES. Cest un signe indéniable dhonnêteté intellectuelle et de franchise politique.
Si nous devions accorder une cotation aux différentes sensibilités politiques françaises, les centristes auraient douze sur vingt, la droite aurait huit sur vingt et la gauche un zéro pointé ! Et nous continuerons à débusquer les menteurs et les manipulateurs partout où ils se trouvent, dans les partis politiques, au parlement ou dans les « académies » (*****).
(*) Ce pacte fut dénoncé à la presse par D. Depris. Il avait été signé en présence de C. Pierret et il prévoyait notamment que le ministère de lenvironnement sengageait à ne pas interférer dans les « dossiers réservés » du ministère de lIndustrie (parmi lesquels les dossiers relatifs aux lignes électriques et à leurs effets sur la santé et sur lenvironnement). Ce fut un acte de trahison pur et simple des principes les plus élémentaires de lécologie politique.
(**) Michèle Rivasi, qui fut lune des fondatrices du « Cri-rad », sest servie des actions menées par cet organisme pour promouvoir sa carrière politique et, en tant que député, elle est demeurée dans la « ligne » du PS, laquelle consiste à ne jamais contrarier la direction dEDF et les responsables du lobby électronucléaire. En 2007, Michèle Rivasi a fondé le « Cri-rem » avec Pierre Le Ruz (qui sétait compromis avec R. Santini et quelques charlatans notoires du monde de la radiesthésie-géobiologie), lequel cri-rem ne sest guère manifesté que par des prises de position incohérentes (si pas absurdes, voir notamment notre communiqué 013-08). Rivasi et Le Ruz se comportent en fait à la manière des Carabiniers dOffenbach qui arrivent quand il ny a plus rien à faire, vingt ans après les premiers combats. Rien de bien sérieux dans tout cela.
(***) En 1991, le groupe de lUnion du centre se composait de MM. Alphandéry, barrot, Bayrou, Bosson, Mme Boutin, MM. Bouvard, Chavanes, Couanau, Cozan, Adrien Durand, Foucher, Fréville, Fuchs, Geng, Gengenwin, Gerrer, Grignon, Grimault, Guellec, Hyest, Mme Isaac-Sibille, MM. Jacquemin, Jean-Baptiste, Kert, Méhaignerie, Mme Monique Papon, MM. Rochebloine, Stasi, Vignoble, Virapoullé, Voisin, Weber et Zeller. Y siégeaient également (comme « apparentés ») MM. Barre, Baudis, Birraux, Briane et Landrain.
(****) Protocole signé par MM. Bérégovoy (premier ministre) et D. Strauss-Kahn (ministre de lIndustrie), par Mme S. Royal (ministre de lenvironnement) et par Gilles Ménage (président dEDF).
(*****) Contrairement à la plupart des organismes qui prétendent soccuper de la défense de lenvironnement ou des consommateurs, le CEPHES na jamais cessé dêtre strictement et authentiquement indépendant. Nous navons jamais sollicité la moindre subvention, le moindre subside, la moindre aide matérielle. Pas plus des pouvoirs publics que du privé. Ce qui na pas été sans nous causer de fréquents problèmes financiers. Mais cest ainsi que nous avons pu sauvegarder notre totale liberté de parole et daction. Quand on veut être libre, on ne tend pas la main !
Mention manuscrite de Michel Rocard en bas dune lettre adressée à Daniel Depris (18 mars 1993). Il fut le seul homme de gauche à avoir reconnu la valeur de la vision socio-politique du président du CEPHES.
Ci-dessous, lextrait dune lettre de Bernard Bosson, président du CDS, au président du CEPHES (8 janvier 1993). Député-maire dAnnecy, Bernard Bosson fut aussi ministre de lEquipement. Il admettait partager, avec Daniel Depris, une même approche « globale et politique » du domaine de lenvironnement. Cest celle qui consiste à dire que lon peut soccuper décologie sans « faire de politique » mais certainement pas sans « tenir compte de la politique ».
Expert de renommée internationale, le président du CEPHES a toujours intégré la « dimension politique » dans son travail sans jamais prendre position pour telle ou telle « famille politique », sans jamais se laisser influencer par des arguments « politiciens ». Cest sans nul doute lun des facteurs qui expliquent sa très grande efficacité face aux grands lobbies industriels.